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8 septembre 2006 5 08 /09 /septembre /2006 20:08

A PROPOS DU SECRET DE BROKEBACK MONTAIN

DE ANG LEE

Affiche américaine. Focus Features

DU NOUVEAU DANS LA REPRESENTATION DES GAYS A L’ECRAN ?

Dans l’histoire de la représentation de personnages gays à l’écran, le dernier film de Ang Lee, Brokeback Montain constitue vraiment une bonne surprise voire même peut être une nouvelle étape. A y regarder de près, peu de films qui traitent de l’amour entre deux hommes échappent (y compris de la part de bien des cinéastes gays) à une vision homophobe de l’homosexualité. Même derrière la sincérité dans la manière de traiter le sujet, le gay, qu’il soit défendu, caricaturé, moqué, montré du doigt ou admiré est bien souvent traité comme un cas à part. Une vision qui n’a pas intégré la capacité d’aimer de la personne homosexuelle comme une composante entière et naturelle. Avec Brokeback Montain , nous sommes en présence d’un film qui échappe au jugement, qui se tient dans une neutralité très honnête et très sincère. Peu de films accordent à ce sujet un traitement aussi juste, sans jamais gommer la complexité de la situation homosexuelle.

Le cinéma qui parle des gays a logiquement suivi les évolutions de la société en la matière. Aujourd’hui on en parle facilement mais est-ce pour autant le signe d’une acceptation ?  Défendre la cause gay ou faire de l’homo un sujet de laboratoire tient aujourd’hui encore de l’homophobie. Au même titre que le débat sur la parité qui souhaite intégrer d’avantage de femmes dans les grandes institutions. Derrière la mode, la fascination et le militantisme se cachent bien des discours qui tendent indirectement à « mettre à part »…. Le cinéma s’ est toujours intéressé au gay, il l’intègre dans son imagerie, le comprend mais ne parvient que rarement à l’intégrer pour ce qu’il est.

 

Quelques repères d’histoire. La représentation de l'homosexualité masculine au cinéma a eu du mal à passer le cap de la caricature ou du dénigrement. Tout d'abord cachée, suggérée en usant de subterfuges pour déjouer les censeurs, elle fut surtout utilisée par le biais de la caricature. Grosso modo jusque dans les années 60 l’histoire du cinéma gay se résume à des histoires de censure. Le sujet reste très tabou et méconnu. L’étude du très intéressant documentaire de Friedman et Epstein The Celluloïd Closet montre bien comment les auteurs gays d’Hollywood ont du jouer avec les codes de censure pour faire passer leurs idées et leurs représentations. Progressivement, l'homo a quitté la sphère de la marginalité et du scandaleux à l’écran, pour suivre la libération des mœurs. Aujourd’hui l’image du gay s’est totalement banalisée, elle est même à la mode. A ce sujet il est attristant de constater comment le lobby gay récupère l’imagerie du cinéma grand public à des fins de pur marketing. Pour le film de Ang Lee, par exemple, l’imagerie « cow-boys », un des fantasmes de l’univers gay, a été largement exploitée, laissant de côté d’autres aspects beaucoup plus intéressants du film, notamment les conséquences sociales et familiales de la relation d’amour entre les deux personnages.

On peut essayer de dégager plusieurs courants de la représentation des gays à l’écran.  

Un premier courant général aborde la question de manière très indirecte, très distanciée. Les films utilisent des procédés esthétiques nombreux pour noyer la question ou la distiller dans un discours plus global. Dans Persona ,  Bergman utilise  un jeu de reflets, d'ombres et d'illusions. Même procédé dans Mulholand Drive de D. Lynch. Le sujet n’est pas abordé de front mais tout le film est imprégné de la question de l’amour du semblable.

Persona I. Bergman

Un deuxième courant, revendicateur celui-ci, se dessine nettement dès la fin des années 80. On assiste à une floraison de films sur les gays qui veulent imposer leur image et leur place. En France Gazon maudit de Balasko, Pedale douce d’Aghion ; en Angleterre Beauthiful Things de McDonald, en Asie Garçon d’honneur de Ang Lee. Voilà quelques exemples. Evidemment on trouve du bon et du moins bon dans ce genre de courant.

On peut aussi répertorier un troisième courant que l’on appellerait « épicurien » qui montre une vision débordante, jouissive de l’homosexualité. Là encore on peut trouver le meilleur comme le pire. Citons quelques exemples comme Théorème de Pasolini, le Satyricon de Fellini, plus récemment Priscilla folle du désert de S. Elliot.

Enfin dernier courant, proche de la fonction revendicatrice : des films isolés, inclassables qui se contentent de montrer sans vraiment juger. Ces films (parmi lesquels je classerais Brokeback Montain ) ont une dimension universelle certaine et montrent une situation homo dans un regard neutre et réaliste sans soucis de plaider une cause quelconque. Dans cette catégorie, on trouve de très bons films gays, parfois des trésors:  My Beautiful Laundrette de Stephen Frears , La confusion des genres de Ilam Duran Cohen, Huit femmes, de F. Ozon, Nettoyage à sec de A. Fontaine ou bien encore le magnifique Priest de A. Bird.

Prêtre de Antonia Bird

Aujourd'hui ce qui fait la force d'un film comme Brokeback Montain c'est bien qu'il échappe à une vision homophobe du gay au cinéma. L'histoire se déroule comme dans la vie, presque à temps réel, on retient une certaine lenteur, presque un engourdissement. le réalisateur montre ce qui se passe, sans porter de jugement personnel moral, il ne s'implique dans son film de ce côté là. Apparemment tout est calme, il se déroule une histoire tranquille , anodine presque de nos jours...Pourtant nous sommes devant l'illustration en images d'une question existentielle: la capacité que nous avons de vivre notre existence en vérité. Ang Lee , au travers de cette trompeuse nonchalence, possède ainsi plus de force pour surprendre le spectateur et laisser surgir la cassure tout au autant que la puisance de l'amour qui unit ces deux personnes. Il prend aussi la liberté de montrer la souffrance qui découle de cette relation, les conséquences personnelles, familiales et sociales. Nous ne sommes pas dans une vison idéalisée de l'homosexualité mais bien dans la perception d'une histoire d'amour vécue intensément avec les questions qui en découlent, comme n'importe quelle histoire d'amour. Chacun de son côté et ensemble aussi, les deux hommes apprennent à mener le combat de l'acceptation qui ne va pas sans douleur. Leur histoire s'affronte également au monde qui est extérieur à leur amour. Les événements se déroulent au fin fond d'une Amérique puritaine et fondamentaliste où couve la violence, prête à refaire surface  derrière les cadres imposés par la société et la religion. Pour les deux personnages -et indirectement pour le spectateur- la question demeure comment vivre la vérité d'un engagement et la liberté de l'amour dans une société qui ne les reconnaît pas.

Brokeback M. possède donc la très grande qualité de montrer, sans militer, qu'il est encore à loin le chemin de l'acceptation de la différence. L'acceptation des gays ici en l'occurence, mais au-delà l'acceptation du chemin que prend tout homme dans son existence. Chemin pour certains si différents et parfois si difficles, dans un monde qui a peur et qui, chaque fois plus, se réfugie dans des réflexes identitaires traditionnels et institutionnels afin de mieux éviter la question de la vérité et de la liberté humaine.

Ang Lee (réalisateur). Pathé Distribution

MA FILMOGRAPHIE GAY DE A à Z

(en couleur mes préférés)

A bigger splash. Jack Hazan

A cause d’un garçon. F. Cazeneuve

L’âge d’or. Louis Bunuel

Alexandre. Oliver Stone

Alger la blanche. Cyril Collard

A toute vitesse. Gael Morel

Le baiser de la femme araignée. H. Babenco

Beautiful things. Hettie McDonald

Le secret de Brokeback Montain. Ang Lee

La cage aux folles. Edouard Molinaro (oubliez les autres !)

The celluloïd closet. Documentaire de J. Friedman et R. Epstein

Chouchou. M. Allouache

La confusion des genres. Ilam Duran Cohen

La corde. Alfred Hitchcok

Les damnés. L. Visconti

Garçon d’honneur. Ang Lee

Happy together Wong Kar-Wai

L’homme blessé. Patrice Chereau

L’homme est une femme comme les autres. J-J. Zilberman

Huit femmes. François Ozon

Juste une question d’amour. C. Faure

La loi du désir. Pedro Almodovar

Maurice. James Ivory

La mauvaise éducation. Pedro Almodovar

Midnight Express. Alan Parker

Minuit dans le jardin du bien et du mal. Clint Esatwod

Mort à Venise. L. Visconti

My beautiful laundrette. S. Frears

Nettoyage à sec. Anne Fontaine

Les nuits fauves. Cyril Collard

O Fantasma. Joao Pedro Rodrigues

Oscar Wilde. Brian Gilbert

Parle avec elle. Pedro Almodovar

Pedale douce. G. Aghion (on aurait pu s’en passer…)

Persona. I. Bergman

Philadelphia. J. Demme

Pigalle. Karim Dridi

The pillow book. Peter Greenaway

Pink Narcissus. James Bidgood

Le Placard. Francis Weber

Presque rien. S. Lifshitz

Prêtre. Antonia Bird

Prick up you ears. S. Frears

Priscilla folle du desert. S. Elliot

Querelle. RW Fassbinder

Les roseaux sauvages. A. Techiné

Une robe d’été. François Ozon

Salo ou les 120 jours de Sodome. P. P. Pasolini

Le sang d’un poète. Jean Cocteau

Le Satyricon. F. Fellini

Sitcom. François Ozon

Son frère. Patrice Chereau

Spartacus. Stanley Kubrick

Le talentueux Mr Ripley. A. Minghella

Le temps qui reste. François Ozon

Tenue de soirée. Bertrand Blier

Thelma et Louise. Ridley Scott

Theorème. P.P. Pasolini

Velvet Goldmine. T. Haynes

a découvrir sur le web

http://cinegay.levillage.org/

vous y trouverez une filmographie complète et détaillée

(le - : même les films qui ne font qu'effleurer le sujet y sont répertoriés la filmographie est parfois tirée par le cheveux!)

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commentaires

P
"parle avec elle" ne peut pas franchement figurer dans une filmographie gay... C'est a peu près le seul d'Almodovar qui n'aborde pas ce thème de l'homosexualité... mais c'est véritablement un amour de film.
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M
Contatctez - moi !L'auteur du blog Monsieur Vaccari pourrait -il me contacter a cette adresse : contatc_movies@yahoo.fr<br /> <br /> Cordialement.
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